Créer son entreprise, une envie qui a, depuis quelques temps, un petit air de contagion. En effet, le nombre de créations d’entreprises continue de progresser (1). Ce « virus » n’épargne pas les salariés, ils sont de plus en plus nombreux à être séduits par l’idée de lancer un projet d’entreprise. Ils se lancent parfois en parallèle de leur activité principale. C’est un moyen de profiter du beurre et de l’argent du beurre, comme le dit l’adage.
Salarié et auto-entrepreneur : un cumul possible, c’est une réalité et bien plus encore. La création du statut de micro-entrepreneur est véritablement une opportunité pour les salariés qui souhaitent tenter l’aventure.
Sommaire :
Quand les questions tombent en avalanche…
Même si la vie d’un salarié n’est pas toujours un long fleuve tranquille, s’aventurer dans les méandres de la création d’entreprise invite à se poser les bonnes questions. Peut-on conserver le bénéfice de son contrat de travail ? Quelles sont les règles de cumul entre les deux statuts ? Quid du régime social et de la fiscalité ? Comment gérer les deux activités ? Quelle répartition du temps de travail ?
A la différence d’un demandeur d’emploi, le salarié en activité peut, en règle générale, prendre son temps pour faire mûrir et lancer un projet de création d’entreprise. Mais il a aussi généralement moins de temps disponible.
Un cumul légalement autorisé
On ne peut pas et on ne doit pas entraver la liberté de travail. Car c’est un des principes figurant dans les textes de la Constitution française. Sauf caractère exceptionnel, les « sages » qui y officient ne prennent pas de décisions à la légère. Ils ont constitutionnellement autorisé le cumul des 2 statuts. Nul ne peut le contester à part éventuellement les éminents membres de ce même Conseil.
Un pari judicieux, être salarié et auto-entrepreneur : un cumul possible
Par conséquent, si un auto-entrepreneur décide de prendre un emploi salarié, il n’est pas tenu d’abandonner la gestion de sa micro-entreprise. De même, un salarié peut librement créer sa micro-entreprise sans rompre son contrat de travail avec l’entreprise qui l’emploie. Salarié et auto-entrepreneur : le cumul est possible.
Quelques exceptions minoritaires
Le président d’une SAS ou d’une SASU peut cumuler son mandat social avec le statut d’auto-entrepreneur. En revanche, le gérant majoritaire d’une SARL ou EURL ne peut pas créer sa micro-entreprise.
On ne peut pas également nommer un auto-entrepreneur gérant majoritaire d’une SARL ou d’une EURL.
Les bonnes raisons de cumuler
Des situations peuvent en effet conduire à cumuler les 2 activités.
Il y a notamment le cas où l’activité de la micro-entreprise ne génère pas un chiffre d’affaires assez conséquent pour subvenir aux besoins financiers de l’auto-entrepreneur. Dès lors, ce dernier peut décider de signer un contrat de travail à temps partiel ou complet pour avoir une source de revenus complémentaires et réguliers. Il peut ainsi parvenir à conserver l’activité d’auto-entrepreneur. Il mène l’activité à laquelle il tient, tout en ayant un niveau de vie satisfaisant et stable.
Une autre situation peut également conduire à mener de front emploi salarié et micro-entreprise. Une personne salariée peut désirer se lancer dans l’entrepreneuriat. Mais elle ne veut pas perdre le bénéfice d’un contrat de travail. Cela concerne notamment la sécurité de l’emploi, le salaire mensuel, l’assurance chômage… tout ce qui permet de bénéficier d’un cadre stable, pérenne.
Le salarié peut alors tester son projet de création de micro-entreprise et évaluer le potentiel de l’activité choisie. Si sa micro-entreprise s’avère rentable, il peut choisir d’abandonner son emploi salarié. En cas de résultats décevants de sa micro-entreprise, il conserve son statut protégé de salarié.
Comment mener de front emploi salarié et micro-entreprise ?
Salarié et auto-entrepreneur est un cumul possible. Toute personne peut vouloir assumer les deux rôles. Elle peut cumuler, mais il faut parvenir à s’organiser pour pour éviter une éventuelle surchauffe, notamment avec un emploi à temps plein en CDI.
Phase préparatoire, lancement du projet, ses étapes incontournables, ses formalités, ses rendez-vous… Tout cela peut s’avérer difficilement conciliable avec un emploi à temps complet. Heureusement, il y a des solutions pour parvenir à mener de front ces deux activités : il est notamment possible de demander un congé pour création de micro-entreprise.
Le congé pour création de micro-entreprise
Le congé pour création de micro-entreprise a plusieurs atouts. Ce congé ne peut pas être refusé par l’employeur. En effet ce dernier a l’obligation d’accorder un congé pour création ou reprise d’entreprise, sous réserve de répondre à un certain nombre de conditions légales : la demande doit être formulée au moins 2 mois avant de partir. Pour pouvoir en bénéficier, en tant que salarié, il faut justifier d’un minimum de 24 mois d’ancienneté au sein de l’entreprise (3). La durée maximale de ce congé est d’un an, avec la possibilité de le renouveler une fois.
La rémunération du salarié est alors suspendue pendant la durée du congé.
Il existe quelques restrictions : il est notamment légalement impossible d’utiliser un congé parental d’éducation (à temps complet comme à temps partiel) pour créer sa micro-entreprise. En revanche, l’auto-entrepreneur déjà immatriculé peut poursuivre une activité individuelle, à temps plein ou à temps partiel, pendant un congé parental.
Les options au terme du congé
Au terme du congé pour création d’entreprise, le salarié a la possibilité, soit de revenir dans l’entreprise dans les conditions initiales, soit de mettre un terme à son contrat de travail. Même si la convention ou l’accord collectif applicable peut prévoir des conditions plus favorables, il existe un certain nombre de restrictions applicables : il faut notamment préciser que si le salarié souhaite réintégrer son poste avant le terme de son congé, l’employeur peut légalement refuser ce retour anticipé. Autre point important : l’employeur peut refuser ce congé pour création d’entreprise, s’il est en mesure de justifier d’une mise en péril de l’activité de l’entreprise (4).
Demander un temps partiel pour création de micro-entreprise
Un salarié peut également demander et obtenir un temps partiel afin d’aménager son emploi de temps (dans les mêmes conditions que le congé à temps plein) pour créer sa micro-entreprise. Dans le cadre de congé à temps partiel, le salaire est maintenu au prorata des heures travaillées par le salarié.
Les règles de cumul
S’il est certain que le fait d’être salarié et auto-entrepreneur est un cumul possible, il faut évidemment respecter un certain nombre de règles
Un devoir de loyauté vis-à-vis de son employeur est une évidence pleine de bons sens. Cela implique notamment certaines règles de base :
– Le micro-entrepreneur ne doit pas concurrencer l’activité de l’entreprise du salarié (5) ;
– ne peut pas travailler à son compte pendant les heures de son contrat de travail ;
– n’a pas le droit de capter la clientèle de son employeur ;
– ne doit pas avoir son employeur pour client et le facturer, notamment en raison du lien de subordination qui demeure.
En cas de non-respect de son obligation de loyauté, le salarié auto-entrepreneur s’expose à un risque de licenciement et de paiement de dommages et intérêts.
La protection sociale et le régime fiscal de l’auto-entrepreneur salarié
L’auto-entrepreneur cotise 2 fois : en tant que salarié, au régime général de la Sécurité Sociale pour la partie de ses revenus provenant des salaires, en tant qu’auto-entrepreneur à la SSI (Sécurité Sociale des Indépendants) pour la partie des revenus liés à l’activité de son entreprise. Il ne bénéfice d’aucune réduction au titre du double assujettissement aux charges sociales.
Concernant la déclaration et l’imposition des revenus, il déclare ses salaires dans la catégorie des traitements et salaires et ses revenus de micro-entreprise dans la catégorie BIC ou BNC.
Salarié et auto-entrepreneur est un cumul possible… à tester
Assumer à la fois les statuts salarié et auto-entrepreneur est un cumul possible et souvent judicieux. Cela permet de tester la création d’entreprise dans des conditions relativement favorables. Mais, ce choix impose certaines règles, certaines contraintes. On ne bénéficie pas d’un régime fiscal et social vraiment optimal, mais c’est le prix à payer pour tester l’entrepreneuriat avec la possibilité de revenir au salariat, si l’expérience n’est pas concluante.
(1) Chiffres INSEE, août 2019, sur une période de 12 mois.
(2) Depuis le 1er janvier 2016, l’auto-entrepreneur est devenu micro-entrepreneur. Par usage, le terme d’auto-entrepreneur continue d’être utilisé.
(3) Contre 36 pour bénéficier d’un congé sabbatique.
(4) Un recours est possible pour le salarié.
(5) L’inverse est aussi valable, si le salarié a dévoilé la nature de son projet à son employeur, et que ce dernier se montre déloyal.