“Plus on en bave et plus les petits moments sympas sont appréciables. C’est souvent un petit peu lié.” Voilà donc ce que déclarait lors de son arrivée, Francis Joyon. C’est ainsi qu’il a remporté la Route du Rhum 2018.
En effet, lorsqu’on travaille en solo, les conditions ne sont évidemment pas comparables à ce qu’endure un navigateur. Mais il y a cependant un point commun entre eux. La réussite du projet ne repose que sur une personne ou presque. Travailler en solo, pas en solitaire : c’est le bon compromis quand un indépendant se voit confier un projet par un client. Reste alors à se préparer à relever un challenge “en solitaire” face aux difficultés. Il doit faire les bons choix. Il est contraint de respecter des délais… garder le cap et ne pas chavirer pour reprendre la métaphore marine.
Sommaire :
Tenir le cap
Un marin ne se lance pas à l’assaut des mers, juste en mouillant le bout de son doigt pour savoir d’où vient le vent. Sinon, il est très vite déboussolé. Un plan de route, un point sur la situation, d’éventuelles solutions de rechange en cas d’imprévu. Navigateur ou entrepreneur, les prérequis se ressemblent.
Tracer sa route, en solo, mais ne pas s’isoler
Respecter les délais
La méthode est la même lorsqu’on prend en charge un projet, une commande. Ça passe presque inévitablement par un rétroplanning qu’on valide avec le client. Il faut se mettre d’accord avec le client, sur les objectifs à atteindre, ce que prosaïquement on nomme : les livrables.
C’est une phase décisive, pour éviter tout risque de naufrage, de dépassement en termes de budget ou de planning. Sur ce dernier point, il est essentiel de ne pas transiger. Il ne faut accepter des délais trop courts ou des tarifs trop serrés.
Une fois le projet lancé, on ne peut plus revenir sur les conditions initiales, les échéances fixées, le budget validé par le client.
Faire le point avec soi
Travailler en solo mais pas en solitaire, c’est se préserver des risques de réunionite, des points projets interminables en interne : toutes ces tâches sont très chronophages. Ce n’est pas une raison pour esquiver une gestion rigoureuse de son emploi du temps. Mais, le timing est crucial et on est seul maître à bord.
C’est pourquoi, il est important de prendre le temps de gérer… son temps. Dès lors, on peut se programmer des points hebdos ou quotidiens, pour « se réunir avec soi-même », sans passer pour un fou. Ainsi, cela permet de faire avancer le ou les projets en cours, d’informer le ou les clients mais également de rythmer, d’organiser son temps professionnel qui n’est pas géré par autrui.
Fuir le syndrome du multitâches
Homme ou femme à tout faire… Voilà une introduction courante pour une petite annonce. Mais cela ne doit en aucun cas être la définition d’un travailleur solo.
Évidemment, dans la réalité, l’équipe se réduit à un membre plutôt polyvalent. Même si l’on doit multiplier les compétences, il est préférable de les utiliser successivement plutôt que simultanément. L’efficacité du multitâches, souvent recherchée telle un Graal par certains employeurs, est un leurre. Le professeur Earl Miller, spécialiste en neurologie au sein du prestigieux M.I.T l’a démontré dans ses travaux de recherches. A défaut de dispatcher les tâches aux différents employés, seul à bord, il faut échelonner les tâches dans le temps. On est ainsi plus efficace dans chaque phase, chaque intervention qu’on doit assumer seul(e).
Se créer une vie d’entreprise
Un planning interne, des brainstormings, des réunions… certains mauvais esprits pourraient diagnostiquer une crise de schizophrénie. Cela peut pourtant s’avérer très pertinent, de recréer des moments-clés qu’on retrouve au sein d’une entreprise composée de plusieurs collaborateurs. L’idée, de prime abord, peut être déconcertante. Un indépendant, un travailleur solo gagne en efficacité, s’il suit son planning hebdo ou mensuel. Il peut se fixer des moments récurrents, pour brainstormer, faire de la veille concurrentielle, établir des bilans opérationnels… Grâce à cette planification, il passe en revue les phases importantes d’un suivi de projet.
Jouer collectif
Avoir « la tête dans le guidon », « faire la course en solitaire » pour rester concentré(e) ne conduit pas forcément à être plus performant. Si l’on poursuit, avec cette allégorie cycliste, au sein d’un peloton on peut trouver du soutien en cas d’essoufflement, d’erreur de stratégie et aussi se challenger.
Échanger, partager est décisif pour avancer en solo, surmonter les éventuelles difficultés rencontrées, chercher un regard neuf, permet d’identifier de nouvelles idées, de nouvelles méthodes, de créer des synergies, d’identifier peut-être de futurs associés, ou collaborateurs en cas de développement de ses activités, de son portefeuille clients.
Se confronter à l’avis, au jugement, d’autres professionnels indépendants ou salariés, c’est aussi une excellente alternative à l’auto-évaluation, pour prendre conscience de ses atouts et de ses erreurs. Il est aussi possible de consulter un expert-comptable sur un sujet en particulier sans forcément qu’il exige d’être rémunéré.
S’imposer un rythme, des objectifs et partager
Travailler en solo, pas en solitaire, c’est pouvoir interagir en totale autonomie sur un projet qu’on a choisi pour un client dont on a identifié les besoins : toutes les conditions sont réunies pour une réussite programmée.
Mais cette liberté a un prix, celui de la rigueur, de la lucidité : il faut être vigilant sur la qualité du travail fourni et respect des délais promis. Car il sera, en effet, impossible de rejeter la faute sur un ou des collègues. En tant qu’indépendant, il faut s’imposer des méthodes, un rythme, une rigueur, des process, une organisation, un suivi, souvent très proches de ceux d’une entreprise classique, voire parfois de l’entreprise qu’on a quittée pour se lancer en solo. Il faut savoir s’entourer pour trouver du soutien, des conseils, des partages d’expériences.
Lancer, développer son activité en indépendant, c’est une opportunité pour travailler à son rythme, selon ses méthodes, et si possible en choisissant ses clients… On peut alors se construire et construire le projet professionnel dont on a rêvé.
Si on a été salarié avant d’être indépendant, cette recherche d’autonomie ne doit pas, si possible, faire oublier tout ce qui fait la richesse d’une entreprise, d’un manager, de collègues. Il faut tirer les enseignements de son expérience en entreprise, s’approprier certaines méthodes, certains processus pour se fixer des objectifs, un cadre, un contrôle, avec le soutien et le regard de son entourage professionnel et personnel. Travailler en solo ne doit pas signifier travailler en solitaire, ni pour son bien personnel, ni pour son business.
Tous les propos de cet article sont soumis à la validation d’un expert-comptable.